Compartir el post "Réunion de l’OTAN dans le cadre de deux crises géopolitiques – Un voyage sans escale de l’Ukraine à l’Irak"
La réunion extraordinaire de l’OTAN (organisation du traité de l’Atlantique Nord) dans une station thermale de la ville de Newport (pays de Galles) a eu un impact global significatif. Cela fait longtemps qu’une réunion de ce genre n’avait pas autant de presse. Cela s’explique par une situation mondiale particulière.
En faisant un résumé, depuis le debut du siècle, des personnages, des événements et des situations divers ont été successivement au centre de la scène mondiale. Ils constituent des conjonctures et des moments différents.
Dans les premières années du XXIe siècle, les « mouvements altermondialiste », les explosions sociales et politiques dans plusieurs pays d’Amérique du Sud (qui ont donné lieu au chavisme, “kirchneristes” en Argentine, Evo Morales en Bolivie, etc.), mais aussi les aventures militaires coloniales des USA au Moyen-Orient sous le prétexte commode des attentats du 11 Septembre, le Ben Laden et compagnie, ont été au centre de la scène. Dans ces aventures, l’Administration Bush a initialement laissé de côté l’OTAN, croyant que les EE.UU étaient tout-puissants.
Puis, avec les défaites militaires (et la démoralisation) des États-Unis, cela a été le tour de la crise économique mondiale (2008) qui a commencé à Wall Street, mais qui aurait un impact maximal dans l’Union européenne, qui, jusqu’à aujourd’hui, est loin de la récupération.
Peu après, ce sont les soulèvements et les révoltes populaires qui ont éclaté en 2011 qui ont pris le relais. Occupy Wall Street et les indignés de l’État espagnol et le plus important, les rébellions qui ont commencé dans le monde arabe, Tunisie, Egypte, Libye, Syrie et d’autres États. C’est un processus qui a subi des défaites tragiques… une des pires conséquences a été d’ouvrir la voie à la barbarie, comme le « État islamique » ou ISIS.
Actuellement, sans que les acteurs et les phénomènes générés dans ces circonstances aient disparus, ce qui occupe le centre de la scène sont les enjeux et conflits géopolitiques ; c’est-à-dire, entre états. De là qu’une réunion de l’OTAN fasse tellement de bruit.
Oscillations géopolitiques
Contre ceux qui considère,t qu’un tout-puissant impérialisme états-unien, par le biais de divers complots, tire les ficelles dans le monde entier, en fait, les éléments de chaos et d’imprévisibilité semblent l’emporter dans ces moments. Et, avant tout, s’imposer même aux États-Unis et à son gouvernement.
En effet, le plan géopolitique des États-Unis , comme nous l’avons souligné il y a longtemps, est le « tournant vers le Pacifique », pour faire face à « titre préventif » à l’émergence de la Chine et dominer la région de développement capitaliste la plus dynamique. de la planète. Pour cela, il a commencé la construction d’un système d’alliances économiques, politiques et militaires non seulement avec les pays de l’Asie-Pacifique mais aussi de l’Amérique latine. Cela inclut aussi le transfert de la majeure partie de son matériel militaire ; premièrement, de leur flotte, à cette zone.
Dans le même temps, les provocations de toutes sortes contre China de part des alliés des États-Unis en Asie-Pacifique ont commencé à devenir une routine. Les exigences sur les différentes îles et îlots qui entourent la Chine, se sont combinés avec des incidents de navires et des avions qui ont failli s’affronter. Par le biais de ces intermédiaires, les Etats-Unis ont commencé à « montrer leurs muscles » à Pékin.
Mais les meilleurs plans peuvent s’avérer compliqués à mettre en place, surtout dans un monde où il n’y a pas une ou deux puissances capables de « maintenir l’ordre ». Après la seconde guerre mondiale, les États-Unis et leurs alliés, d’un côté, et le bloc soviétique, dirigé par l’URSS, de l’autre, pourraient imposer un relatif « ordre géopolitique ». Après la chute de l’URSS, il semblait que les États-Unis assumaient le rôle de « superpuissance », à laquelle tout le monde devrait obéir.
Mais cela a duré, géopolitiquement, beaucoup moins que prévu. Tout en restant la principale puissance, les EE.UU se sont affaiblis relativement dans plusieurs aspects. Dans le même temps, la Chine a monté économiquement et militairement. Et la Russie, sans en arriver à avoir une force comparable à celle de l’ex-Union soviétique, a réussi à sortir d’une situation qui lui a mis sur le bord de la désintégration dans les années 1990.
Il n’y a aujourd’hui un arbitre incontestable qui dicte la Loi et impose « l’ordre » dans le monde entier. Nous pourrions dire que « tout le monde fait son jeu ». Cette situation est le résultat de processus différents, de l’échec des aventures militaires dans le grand Moyen Orient à la crise qui a débuté en 2008. Une des conséquences les plus curieuses de tout cela, c’est que la principale puissance militaire impérialiste, les EE.UU, a beaucoup de difficultés pour opérer militairement sur le terrain ; autrement dit, pour envoyer des troupes. L’opinion publique américaine a été très affectée par les aventures de l’Iraq, l’Afghanistan, le Pakistan et d’autres scénarios… et elle ne s’est pas récupérée.[[1]]
Faire la guerre avec les drones, c’est une manifestation de grande puissance technologique, mais cela ne suffit pas. De Quel genre de « superpuissance » s’agit-il, si elle ne peut pas mettre troupes massivement dans les scénarios de guerre, comme ils pourraient le faire, s’ils le souhaitent, la Chine ou la Russie ? –
L’Ukraine et le « État islamique »: de mal en pis
Dans cette situation, la crise en Ukraine, tout d’abord et l’expansion de « l’Etat islamique », ensuite, ont renforcé les tensions géopolitiques et mis à l’épreuve la coalition des Etats-Unis et ses alliés, en particulier ceux de l’OTAN. –
Dans tout cela, il y a eu un développement relativement « confus », autour d’un « pétrin » géopolitique où les Etats-Unis semblent avoir été obligés de changer de «ennemi principal » au milieu de la bataille… même si c’est peut-être prématuré de définir… –
Initialement, avec les événements en Ukraine, que sans être identiques, combinent, d’une part une guerre civile, et, d’autre part, une confrontation géopolitique avec la Russie, les EE.UU y ont concentré et leur attention et ont « discipliné » leurs alliés européens de l’OTAN dans la ligne de confrontation avec Moscou. Mais dans ce domaine, selon Wallerstein, il n’y a pas la même disposition à Washington qu’à Berlin, qui voudrait plutôt un accord définitif avec Poutine.[[2]] –
En tout cas, sur cette voie de la confrontation avec Moscou, l’OTAN déjà avant la réunion de Newport avait annoncé une série de mesures qui non seulement établissent un siège autour de la Russie, mais qui vont jusqu’à la provocation du déploiement des troupes sur de nouvelles bases d’Etats baltiques et de la Pologne. Une partie de ces plans qui visent la Russie, serait d’organiser un dispositif de bases militaires et des troupes du « triangle de Weimar » (France, Allemagne et Pologne) pointant vers l’est. Mais en Allemagne il y aurait une forte opposition politique qui rend difficile l’application de ce projet… au moins dans la mesure qui en voudraient les EE.UU.[[3]] –
Mais, déjà à la veille de la réunion de l’OTAN, la situation et les axes changeaient. La défaite des troupes de Kiev dans le sud-est de l’Ukraine et surtout l’expansion de « l’Etat islamique » en Irak et en Syrie, ont imposé un autre « centre de gravité ». –
Les États-Unis et plusieurs alliés européens majeurs, ont annoncé la formation d’une « coalition » militaire pour lutter contre le « Etat islamique ». Selon le New York Times, cette Alliance issu de la réunion de l’OTAN, inclut en principe les EE.UU, le Royaume Uni, la France, le Canada, l’Allemagne, la Turquie, l’Italie, la Pologne et le Danemark.[[4]] –
« Nous dirigeons, mais c’est vous qui y allez ! »
On ne sait pas comment cette « coalition » militaire fonctionnera. Mais, selon le New York Times, en principe aucun de ces pays mettrait des troupes sur le terrain… En fait, tout serait basé sur « les bombardements des EE.UU contre les des dirigeants et les positions d’ISIS et l’enrôlement des gouvernements amis dans la région pour qu’ils rejoignent la lutte… » (NYT, cit.). Si personne ne va envoyer des troupes et les Etats-Unis prendront en charge les bombardements, quelle guerre i vont mener le Danemark, l’Italie, la Pologne et les autres héros engagés dans cette croisade ?
Dans ce sens, le New York Times se demande comment Obama «sera capable de vaincre l’ISIS sans indirectement aider le Président Bashar al – Assad de Syrie…». –
Un autre inconvénient important c’est que certains « gouvernements amis dans la région », qui fourniraient la chair à canon pour lutter contre l’ISIS, peuvent ne pas être fiables à cet égard. Par exemple, ceux de l’Arabie saoudite et des États du Golfe, d’où vient une grande partie du financement d’ISIS … En revanche, entre les ennemis implacables de l’ISIS on trouve des forces comme l’Iran ou le Hezbollah au Liban, où ISIS a déjà commencé à agir. La grande coalition organisée à l’Assemblée de l’OTAN, devra fonctionner avec eux ?
La seule chose qui est claire c’est que les Etats-Unis et d’autres membres de la coalition formé lors de la réunion de l’OTAN, sont d’accord que « c’est aux autres de fournir de la chair à canon ».
Bien sûr, le « Etat islamique » est un monstre réactionnaire. Mais l’intervention impérialiste, qu’elle soit avec des bombes ou avec des troupes sur le terrain, ne ferait qu’aggraver encore plus les choses. Est-ce que l’ISIS est née de l’air ? N’est-il pas peut-être la conséquence réactionnaire des guerres coloniales et de toute la barbarie impérialiste dans la région, qui, depuis le golfe de la première guerre (1990/91), a causé seulement en Irak, plus de 1 million de morts
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[1].- Bien que maintenant les atrocités commises par l’Etat Islamique pourraient permettre à l’impérialisme de commencer à s’en débarrasser de cet obstacle.
[2].- Voir Immanuel Wallerstein, “Merkel y Putin: diplomacia ucraniana”, en www.socialismo-o-barbarie.org. (en espagnol)
[3].- Tobias Bunde, “Building NATO’s «Weimar Triangle»”, Project Syndicate, August 29, 2014.
[4].- Helene Cooper, “Obama Enlists 9 Allies to Help in the Battle Against ISIS”, New York Times, September 05, 2014.
Par Claudio Testa, Socialisme ou Barbarie, 11/09/2014