Compartir el post "Après le massacre à Paris, le gouvernement Hollande militarise le pays"
Le 7 janvier, deux hommes armés de kalachnikovs, ont fait irruption dans la rédaction du journal satirique Charlie Hebdo et ont tué 12 personnes. Le jour même de l’attaque, Socialisme ou Barbarie France a publié une déclaration dans laquelle il dénonçait l’attaque, en même temps, qu’il mettait en garde contre l’islamophobie croissante. La situation, évidentement, ne s’est pas arrêtée le 7 janvier: tout d’abord, parce que les actes de violence se sont étendus quelques jours; deuxièmement, de par les conséquences politiques de l’attentant. Dans cet article, nous nous concentrerons donc sur la description les jours qui ont suivi l’attaque et comment celui-ci a eu un impact sur la scène politique.
Une semaine sanglante
Après le massacre de Charlie Hebdo, les frères Kouachi, responsables de l’attaque, ont pris la fuite, une opération de police énorme se met en place pour les arrêter. Le 8 jeudi au matin, un individu ouvre le feu sur deux policiers à Montrouge, tuant l’un et blessant l’autre; pendant toute la journée la recherche des frères Kouachi continue, au premier rang de toutes les infos. Le vendredi 9, les frères Kouachi, encerclés par la police, s’enferment dans une imprimérie de Dammartin-en-Goele, à 50 kilomètres au Nord-Ouest de Paris. Dans le même temps, Amedy Coulibaly, responsable de l’attaque contre les deux policiers jeudi, prend des otages dans un supermarché kosher de la Porte de Vincennes.
Pendant le vendredi 9, la prise d’otages simultanée a retenu l’attention de tout le pays, suivie en direct par tous les médias. Enfin, vers 17 heures, les troupes d’élite de la gendarmerie ont donné l’assaut, tuant tout d’abord les frères Kouachi et ensuite Amedy Coulibaly; ce dernier ayant tué 4 otages, tous de confession juive. Dans une interview à la presse pendant qu’ils maintenaient la prise d’otages, le frères Kouachi ont déclarée être financés par A-Qaïda Yémen; Coulibaly s’est réclamé de l’État islamique dans une vidéo posthume.
Comme nous l’avons dit dès le début, nous rejetons fermement ces attaques absolument réactionnaires. Dans le cas des frères Kouachi, il s’agit d’une grave atteinte contre la liberté d’expression, visant des civils désarmés d’un hebdomadaire qui malgré la dérive islamophobe de ces dernières années, avait eu une sensibilité de gauche pendant des années. Dans le second cas, il n’y a aucune doute qu’il s’agit d’un attentat antisémite, tout aussi condamnable.
Dans le même temps, nous avons mis en garde sur les risques de l’augmentation de l’islamophobie, qui se développe depuis des mois, avec l’émergence du Front National, le virage à droite de la scène politique, les politiques anti-immigration promues par le gouvernement. Malheureusement, ces risques ont été confirmés.
Une islamophobie croissante
Après l’attaque contre Charlie Hebdo, les actes islamophobes ont commencé à se multiplier. La nuit qui a suivi l’attaque, une bombe a explosé dans un kebab à côté d’une mosquée, une mosquée a été attaquée avec une arme à feu et une autre avec une grenade. À ceci s’ajoutent des attaques contre des jeunes musulmans (comme un attaque qui a eu lieu pendant la « minute de silence » dans un lycée de l’Isère), de menaces et d’autres.
À ces actes s’ajoute le discours politique et des médias au sujet des attaques. Tout d’abord, l’extrême-droite à travers Marine Le Pen et Jean-Marie Le Pen, qui ont défendu le rétablissement de la peine de mort et ont attribué les attentats à « l’immigration massive » (c’est-à-dire, du Maghreb et majoritairement musulmane) qui existe depuis quarante ans. Mais aussi la droite, comme le député d’UMP Laurent Wauquiez, qui indique que « les musulmans doivent faire le choix de la République ».
C’est précisément l’un des points centraux de l’islamophobe déchaîné par la presse. Dans la télévision, les radios et les journaux, la même exigence est faite aux musulmans: « désolidarisez-vous de l’attaque ». C’est-à-dire, les musulmans seraient « par définition » terroristes, jusqu’à ce qu’on prouve le contraire.
La politique d’unité nationale qui profite à Hollande
Le soir même de l’attentat contre Charlie Hebdo, Hollande a tenu une allocution télévisée dans laquelle a appelé à « l’unité nationale » pour faire face à la situation. Cet appel a été repris par les médias principales, ainsi que par les principales forces politiques. Une grande consécration de cette politique ont été les énormes mobilisations qui ont traversé la France ce dimanche.
En effet, les mobilisations ont été contradictoires. D’une part, elles ont exprimé la juste indignation de millions de personnes contre ces attaques réactionnaires, la défense de la liberté d’expression; au moins à Paris, nous n’avons vu aucune référence islamofobique, des drapeaux Français étaient minoritaires. Dans l’ensemble, il s’agissait d’une marche « démocratique-bourgeoise » pour la défense des droits démocratiques minimales, mais sans remettre en cause la politique du gouvernement.
À cela s’ajoute le fait que la marche a été largement instrumentalisée par le gouvernement. Tout d’abord, parce que la mobilisation est apparue comme une proposition du gouvernement, une « marche républicaine » qui a été convoqué juste après l’attentat. À cette mobilisation se sont joint des dirigeants internationaux, comme Rajoy, Merkel, Juncker, ou même Netanyahu et Lieberman, responsables des massacres en Palestine. Malgré le fait d’avoir marché deux cents mètres, complètement protégés et loin des gens, l’image de cette « tête de la manifestation » a fait la une des journaux.
Globalement, la situation actuelle a donné une bouffée d’air frais à Hollande et au régime de la V République, fortement remis en question. Plusieurs hommes politiques ont salué la gestion de la crise de la part du gouvernement; dans la séance du Parlement d’aujourd’hui, les discours du premier ministre ont été fortement applaudis et les deputés ont chanté à l’unisson la Marseillaise. Selon les derniers sondages, l’image positive de la Hollande a augmenté de 5 points.
À cela s’ajoute une légitimation du régime dans son ensemble. Ainsi, dans les manifestations on a pu voir des gens mobilisés embrassant les gendarmes et les CRS, leur applaudissant comme des « défenseurs de la liberté », quand ce sont les mêmes qui ont tué Rémi Fraisse il y a quelques mois, ceux qui répriment toutes les manifestations.
Une militarisation accrue de la société
A partir de cette légitimation et répondant aux pressions d’une partie du personnel politique et des médias qui réclament « plus de sécurité », qui disent que nous sommes en « guerre », le gouvernement a augmenté le niveau de militarisation de la société. Le jour de l’attentat, le plan VigiPirate a été élevée à « niveau attentat », le plus haut niveau.
Depuis ce moment, le plan est maintenu à ce niveau et plusieurs mesures de sécurité intérieure ont été mises en place. Tout d’abord, une présence plus grande des forces de sécurité (gendarmes et CRS, mais aussi des soldats) dans des endroits comme les principales gares: ils peuvent vérifier l’identité de toute personne « préventivement ». Dans les universités, la sécurité privée contrôle les cartes d’étudiant à l’entrée et dans certains cas même les sacs. Le gouvernement a parlé déjà d’augmenter le contrôle sur internet, sous prétexte de limiter « la propagande haineuse ».
A cela s’ajoute l’annonce, lundi 12 janvier, du déploiement de 10.000 soldats sur le sol Français pour « protéger les points sensibles ». C’est la plus grande mobilisation militaire sur le sol Français dans l’histoire et, combinées à celles déployées dans les aventures coloniales de l’impérialisme Français, l’armée Français atteint sa capacité maximale.
Faire éclater l’unité nationale avec la mobilisation des travailleurs et de la jeunesse
Sans aucune doute, le climat de « unité nationale » qui s’est installé va à l’encontre des intérêts des travailleurs et des jeunes. D’une part, parce qu’il a détourné l’attention des attaques majeures que le gouvernement prépare contre la classe ouvrière, et parce que celui-ci s’est légitimé par le biais de toute cette opération, étant ainsi plus facile de faire passer des réformes qu’il avait prévu.
Deuxièmement, parce que le climat répressif qui s’installe dans le pays pourrait se retourner rapidement contre ceux qui luttons. De même, la présence de milliers de gendarmes et de militaires dans les principaux points du pays sont un grand danger pour les milliers de sans-papiers qui sont forcés de se déplacer, et qui pourraient tomber sous l’emprise d’un d cess contrôles aux faciès qui les caractérisent.
Face à cette situation, les travailleurs et la jeunesse doivent intervenir avec leur propre politique, indépendante de l’unité nationale bourgeoise, en défense de l’unité des secteurs populaires, quel que soit leur origine ethnique ou leur réligion, dans la lutte contre la politique répressive et d’austérité du gouvernement.
Ce sera le seul moyen de freiner l’islamophobie grandissante qui s’est développé après l’attentat contre Charlie Hebdo, de lutter contre la militarisation croissante du pays, de faire tomber les divisions que les classes dirigeantes veulent nous imposer.
Par Ale Vinet, Socialisme ou Barbarie France, 14/01/2015