Abr - 21 - 2015

Ce mercredi 15 avril est convoquée une importante journée de lutte aux États-Unis. Le but: que le salaire minimum horaire soit élève à 15 dollars, et qu’il y ait de la liberté de syndicalisation pour tous les travailleurs.

Le mouvement par les 15$ / heure se développe depuis quelques années parmi les travailleurs du soi-disant « secteur tertiaire ». Il y a eu parmi ses protagonistes aux employés de Wal-Mart et récemment de McDonalds et d’autres chaînes de restauration rapide.  Les ont également rejoint  d’autres secteurs touchés par les salaires de misère.

Le 4 avril dernier a eu lieu une mobilisation à New York, à laquelle s’est joint un nombre important de travailleurs de la construction. L’image des casques défilant dans la principale ville de la grande puissance impérialiste, est un symbole puissant que la classe ouvrière n’est pas morte, ni a cessé d’exister, contrairement aux spéculations postmodernes.

Ce mouvement a déjà obtenu quelques triomphes partiels: McDonalds’ s’est vu contraint à accorder une faible augmentation de salaires à des milliers d’employés, comme Wal-Mart l’avait fait antérieurement. Dans certaines villes comme Seattle les propres conseils municipaux  ont dû approuver des projets qui établissaient le minimum de 15 $ / heure, mais à travers des augmentations progressives.

Il reste à savoir le degré d’adhésion qui atteindra la journée de lutte du 15, mais en tout cas, il s’agit d’un important pas en avant. La classe ouvrière nord-américaine vient d’une longue accumulation de défaites (multipliée après la crise de 2008), mais il y a plusieurs signes d’une tentative de recomposition: petits mais importants noyaux d’organisation et de lutte.

Cela s’ajoute à une diversité d’expériences de mobilisation non nécessairement des travailleurs, mais qui mettent au centre les revendications des secteurs populaires. L’emblème a été le mouvement Occupy Wall Street et actuellement le mouvement antiraciste  « Black Lives Matter » ( « Les vies des noirs sont importantes ») contre les assassinats quasi-quotidiens des afro-américains par des policiers blancs.

Encore de manière fragmentaire et initiale, ils commencent à remettre en question  plusieurs des piliers de la société nord-américaine.

La crise, la récupération et la montée des « workingpoor »

La crise économique qui a commencé aux États-Unis en 2008 a frappé très fortement la classe ouvrière nord-américaine. Se sont perdus un grand nombre d’emplois dans l’industrie, c’est-à-dire des postes relativement stables, bien rémunérés et ayant le droit de se syndiquer. En peu de temps le taux de chômage a énormément augmenté.

L’énorme masse de chômeurs a commencé donc à accepter des emplois moins payés et plus instables que les précédents. Sur cette base, l’économie a commencé à « se récupérer ». C’est- à-dire les employeurs  ont à nouveau eu des bénéfices énormes et ont relancé la dynamique de l’accumulation. Le résultat a été une reprise en matière d’emploi, mais avec une considération importante ce ne sont pas les anciens emplois industriels et bien rémunérés qui ont été crées. Au lieu de cela, les nouveaux emplois créés étaient pour la plupart sur la base des salaires très bas, l’interdiction de se syndiquer, principalement dans le secteur des services, etc.

Cela a généré un problème socio-économique de conséquences très importantes. La fameuse « classe moyenne » nord-américaine, symbole de l’histoire du  « American Way of Life » [[1]], est en danger d’extinction. À sa place, croît de plus en plus le secteur des «workingpoor» (travailleurs pauvres). C’est-à-dire, des personnes qui ont un emploi, mais dont les revenus ne leur permettent pas d’avoir un niveau de vie acceptable, et qui doivent subir de longues heures de travail et avoir recours aux aides d’État afin de soutenir leurs familles.

Ce phénomène a une incidence énorme entre les secteurs des travailleurs appartenant aux  « minorités » (les noirs, les latinos), entre les femmes et des larges parties de la jeunesse. Une nouvelle classe ouvrière fragmentée, précarisée, atomisée, où l’ancienne classe ouvrière WASP (blanc, Anglo-Saxon, Protestant) est seulement une minorité, tend à se mettre en place.

Une conséquence d’une énorme importance, c’est que le « rêve américain » de mobilité sociale qui, jusqu’il y a une génération semblait  être indestructible, commence à s’effondrer. Maintenant, personne ne croit que seulement avec le « effort » et « des études » on peut prospérer. Des millions de travailleurs doivent faire une double journée de travail pour pouvoir juste payer les factures de la maison et la nourriture. Dans ces conditions, étudier n’est même pas une possibilité. Au XXIe siècle, dans la plus grande puissance impérialiste de la planète, des portions très importantes et croissantes de la classe ouvrière ont à nouveau le même manque de perspectives de « progrès » que celui qui avaient les travailleurs au XIXe siècle.

Un autre aspect fondamental est que la sortie de la crise sur ces bases a conduit à une augmentation considérable des inégalités sociales. La partie de la richesse produite socialement que la minorité des grandes employeurs retient est de plus en plus grande et  la partie qui va à la grande majorité des travailleurs de plus en plus pétite.

Un mérite énorme du mouvement « Occupy Wall Street » (malgré le fait qu’il n’ait pas pu se maintenir dans le temps), est d’avoir réussi à installer dans les grandes sections de masses une idée très claire et didactique: que l’intérêt du 99 pour cent de la population s’oppose à celui du 1 pour cent qui possède de grandes richesses dans ses mains.

Ce concept, même si ce n’est pas encore une élaboration de classe, nous permet de comprendre où est l’ennemi contre lequel on doit se battre: dans les grandes banques, multinationales et leurs représentants politiques dans le Congrès et le gouvernement. Bien que ce dernier – la question d’une alternative politique de classe – est, logiquement, ce qui est le moins développé dans la conscience des masses.

La nouvelle « classe ouvrière » : une importante accumulation d’expériences

Cette nouvelle « classe ouvrière » a déjà fait un certain chemin d’accumulation d’expériences. Un de ses affluents est la longue lutte des immigrés (principalement latins) pour la reconnaissance de leurs pleins droits en tant que citoyens. Une étape importante dans ce combat a été une importante grève et mobilisation qui a été réalisé le premier mai 2006, qui a récupéré cette date historique relativement oubliée dans la mémoire collective nord-américaine.

Les travailleurs et les jeunes noirs ont aussi leur propre tradition de lutte, qui remonte à la lutte pour les droits civiques dans les années 1950 et 1960, avec tous ses traditions (autant  « les traditions pacifiques » inspirés dans Martin Luther King comme les traditions révolutionnaires des « Panthères Noires »). Actuellement, le mouvement antiraciste  « Black Lives Matter » reprend ces traditions et les met à jour.

Le mouvement Occupy a laissé une trace importante: des dizaines et des dizaines de petits ou moyens collectifs d’organisation sur des sujets variés. Les réseaux sociaux servent de support pour réunir des militants autour de ces plateformes: contre les coups budgétaires, pour le salaire minimum, pour les droits des minorités, etc.

Il y a aussi des diverses expériences d’union entre les travailleurs syndiqués et les différents secteurs de groupes militants. Au plus fort du mouvement Occupy, cela a conduit à des actions en commun dans plusieurs villes, notamment un blocus des ports [2] pour soutenir les travailleurs portuaires et les camionneurs (réalisé en 2011).

Les secteurs les plus « traditionnels » de la classe ouvrière ont également réalisé certaines actions importantes récemment, comme une grève nationale des travailleurs du pétrole il y a quelques mois.

Le mouvement pour les 15 $/ heure s’appuie sur les « marches » construits par toute cette accumulation d’expériences. C’est-à-dire il commence à partir d’une certaine accumulation d’expérience et d’organisation qui lui permet de commencer à se projeter un peu plus loin: en atteignant une extension territoriale nationale et en couvrant différents secteurs des travailleurs. Bien qu’il n’ait toujours pas réussi à pénétrer dans le cœur de la classe ouvrière nord-américaine (les secteurs industriels), la dynamique de ce processus est ascendante.

Le développement de ce mouvement a permis même qu’une militant trotskiste (Kshama Sawant) soit élue au Conseil municipal de la ville de Seattle, après être devenue une référence dans la lutte pour les15$ / heure.

Par conséquent, le développement de ce combat peut être une étape importante vers le début d’une véritable recomposition politique et syndicale de la classe ouvrière nord-américaine C’est cette perspective que les révolutionnaires défendons

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[1]-Littéralement  « Mode de vie américain »: c’est le cheval de bataille idéologique de l’impérialisme nord-américain, surtout après la Seconde Guerre Mondiale et la prospérité économique énorme d’après-guerre.

[2].- Voir article “El movimiento Occupy ataca de nuevo: bloqueo de puertos contra el 1%”, por Ale Kur, SoB 216, diciembre de 2011, en espagnol.

Par Ale Kur

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