Crise: l’heure de vérité
Par Isaac Johsua
A l’encontre, 08/08/11
Nous voilà à la veille du troisième anniversaire de la
chute de Lehman Brothers qui, le 15 septembre 2008, a marqué
le début officiel de la crise proprement financière. Une
nouvelle crise occupe le devant de la scène, celle de la
dette souveraine, et elle est présentée comme totalement
indépendante de la première. Il y a surendettement des
Etats et ce surendettement serait dû à l’impéritie des
gouvernements, à leur laisser-aller en matière de dépenses.
Il n’en est rien: la crise de la dette souveraine n’est
qu’une prolongation de la grande crise qui a failli
emporter le monde il y a trois ans. Avec l’éclatement de
la bulle immobilière (en particulier américaine), la dette
des ménages est devenue celle des organismes financiers, et
celle-ci à son tour est devenue celle des Etats. Un exemple
caricatural est celui de l’Etat irlandais, prenant à sa
charge les engagements de banques plombées par les actifs
«pourris» de la crise financière, essayant de combler un
puits sans fond: 29,3 milliards d’euros, par exemple, pour
tenter d’assainir la seule Anglo Irish Bank; 50 milliards
d’euros en 2010, soit près d’un tiers du PIB, pour
renflouer des banques dont les pertes avaient été
auparavant dissimulées [1].
L’incapacité des ménages à faire face à leurs
obligations a mis en péril la sphère financière et les
Etats n’ont pas hésité une seconde à voler à son
secours, sans poser aucune condition, suivant le bon vieux
principe: «privatisation des profits, socialisation des
pertes». En Europe, selon la Commission, pour recapitaliser
les banques et éponger leurs actifs toxiques, 230 milliards
d’euros auraient été dépensés par les Etats, soit un
peu plus de 2% du PIB européen [2]. Aux Etats-Unis, le
Troubled Asset Relief Program (TARP) a accordé des aides à
diverses institutions financières pour un montant de 700
milliards de dollars; parallèlement, la Fed (banque
centrale américaine) a prêté à ces institutions à taux
zéro pour plus de 2500 milliards de dollars. En octobre
2010, le coût total du seul sauvetage financier s’élevait
à 7800 milliards de dollars [3]. La pelote empoisonnée
du surendettement a ainsi été transmise de main en main,
mais elle n’a pas disparu pour autant, au contraire. A
cette lourde charge s’est ajouté l’effet mécanique du
recul de l’activité sur les finances publiques, un effet
qui tarit les recettes fiscales et pousse au contraire les dépenses
publiques à la hausse. Le tout sans oublier le poids écrasant
des divers plans de relance. En 2008, 27% du PIB mondial
auraient ainsi été injectés pour sauver le système en
perdition [4]. La Chine à elle seule a mis en œuvre
un plan de relance de 585 milliards de dollars.
La meilleure preuve de la filiation qui relie la crise
immobilière à celle des Etats nous l’avons avec le
tableau 1, qui retrace l’évolution du poids du déficit
public dans le PIB. De 2005 à 2007 ce poids demeure dans
des limites tout à fait raisonnables pour la plupart des
pays européens aujourd’hui sur la sellette. En réalité,
l’extraordinaire bond de ce déficit est à dater de 2008
et 2009, avec le sauvetage des banques, les plans de relance
à grands frais et alors que s’enregistrent dans
l’activité (et dans les recettes fiscales) les retombées
de la grande crise du XXIe siècle.
Le déficit public de la zone euro dans son ensemble, à –
6,3% du PIB en 2009, n’était qu’à – 0,7% en 2007.
Pour le total OCDE, nous passons de -1,3% en 2007 à -8,2%
en 2009. Certains pays étaient même en excédent en 2007
et ce parmi les plus menacés aujourd’hui, comme
l’Irlande ou l’Espagne. Ajoutons que les innombrables dégrèvements
consentis aux plus riches dans la plupart des pays,
l’asile offert aux profits et la bride sur le cou à la
finance ont aussi contribué à réduire les recettes
fiscales et ainsi désarmé les puissances publiques à un
moment crucial.
TABLEAU 1
Evolution des déficits (-) ou excédents (+)
publics en % du PIB
|
2005
|
2006
|
2007
|
2008
|
2009
|
2010
|
Allemagne
|
-3,3
|
-1,6
|
+0,3
|
+0,1
|
-3,0
|
-3,3
|
Espagne
|
+1,0
|
+2,0
|
+1,9
|
-4,2
|
-11,1
|
-9,2
|
Etats-Unis
|
-2,8
|
-1,9
|
-2,3
|
-5,3
|
-10,4
|
-10,1
|
France
|
-2,9
|
-2,3
|
-2,7
|
-3,3
|
-7,5
|
-7,1
|
Grèce
|
-5,3
|
-6,0
|
-6,7
|
-9,8
|
-15,6
|
-10,4
|
Irlande
|
+1,6
|
+2,9
|
+0,1
|
-7,3
|
-14,3
|
-32,4
|
Italie
|
-4,4
|
-3,3
|
-1,5
|
-2,7
|
-5,3
|
-4,5
|
Japon
|
-6,7
|
-1,6
|
-2,4
|
-2,2
|
-8,7
|
-8,1
|
Portugal
|
-5,9
|
-4,1
|
-3,2
|
-3,6
|
-10,1
|
-9,2
|
Royaume-Uni
|
-3,3
|
-2,7
|
-2,8
|
-4,8
|
-10,8
|
-10,3
|
Zone
Euro
|
-2,6
|
-1,4
|
-0,7
|
-2,1
|
-6,3
|
-6,0
|
Total
OCDE
|
-2,8
|
-1,3
|
-1,3
|
-3,3
|
-8,2
|
-7,7
|
Source: OCDE - Pour les
Etats-Unis, comptes nationaux, net borrowing de l’Etat fédéral
en % du PIB. - Pour la France, comptes nationaux,
INSEE.
Nous avons une confirmation de ce point de vue avec le
tableau 2, qui présente l’évolution du total de la dette
des administrations centrales en % du PIB. En 2005, ce
pourcentage se situe à des niveaux particulièrement bas
pour certains pays (Irlande, Espagne, par exemple), à des
niveaux particulièrement élevés pour d’autres (Grèce,
Japon, par exemple). Mais, dans tous les cas de figure, le
ratio fait un véritable bond en 2009, voire même dès
2008. Le lien, là encore, est clairement établi avec la
grande crise de ce XXIe siècle
débutant, qu’il s’agisse du sauvetage des banques sur
frais publics, de plans de relance hors du commun ou de
l’effondrement de recettes fiscales qui accompagnent la
chute de l’activité.
TABLEAU 2
Total de la dette de l’administration centrale en %
du PIB
|
2005
|
2006
|
2007
|
2008
|
2009
|
Allemagne
|
40,4
|
40,9
|
39,4
|
38,8
|
43,0
|
Espagne
|
36,4
|
33,0
|
30,0
|
33,7
|
46,1
|
Etats-Unis
|
36,1
|
36,0
|
35,6
|
40,0
|
53,1
|
France
|
53,3
|
52,1
|
52,1
|
54,2
|
60,8
|
Grèce
|
110,3
|
107,5
|
105,8
|
109,6
|
125,7
|
Irlande
|
23,6
|
20,3
|
19,8
|
27,7
|
46,0
|
Italie
|
97,5
|
96,7
|
95,2
|
98,0
|
106,6
|
Japon
|
164,3
|
161,4
|
164,2
|
178,0
|
Nd
|
Portugal
|
68,2
|
69,8
|
69,2
|
71,2
|
81,1
|
Royaume-Uni
|
43,4
|
43,3
|
42,6
|
61,3
|
75,1
|
Source: OCDE - Nd = non
disponible
Pour tenter d’endiguer le mouvement de défiance, un
fonds européen a été créé, un premier soutien de 110
milliards d’euros accordé au printemps 2010 à la Grèce
(dont la dette publique s’est alors élevée à 140% du
PIB). Depuis, la menace s’étend: immédiatement après la
Grèce viennent l’Irlande et le Portugal, avec des dettes
publiques atteignant respectivement 114% et 93% du PIB. Puis
l’Espagne et éventuellement l’Italie, avec une dette
publique hissée à 120% du PIB. Et enfin, pourquoi pas, la
France. Le 21 novembre 2010 l’Irlande chute à cause de
ses banques et obtient une aide de 85 milliards d’euros de
l’UE et du FMI. Le 7 avril 2011, le Portugal est atteint
à son tour; le 3 mai 2011, il reçoit une aide de 78
milliards d’euros de l’UE et du FMI, alors qu’il a
fini l’année 2010 avec un déficit public de 9,2% du PIB
et une dette publique de 160 milliards d’euros. Partout,
en contrepartie de cette «aide», d’énormes sacrifices
sont demandés, partout c’est aux populations de régler
les frais d’une crise qui n’est pas la leur, et
jusqu’au dernier centime.
Sous la pression des «marchés», chaque pays veut donner
l’exemple de la rigueur, s’imaginant échapper ainsi à
la sanction. Il a suffi que l’Italie soit menacée par la
spéculation, pour qu’un deuxième plan d’austérité
(de près de 48 milliards d’euros) soit élaboré et voté
dans la précipitation le 15 juillet 2011. Il prévoit de
nouvelles privatisations, le gel des salaires et des
embauches de fonctionnaires et une réduction des dotations
des collectivités. Cette mécanique du «bon élève» est
en réalité un terrible cercle vicieux. Les réductions
massives de dépenses publiques dans tous les pays (y
compris aux Etats-Unis), la course générale à l’austérité,
contribuent à réduire l’activité: ainsi, les mesures
appliquées en contrepartie de l’aide financière de 78
milliards d’euros accordée au Portugal devraient entraîner
deux années de récession, en 2011 et 2012, de l’aveu même
des promoteurs de cette aide [5]. La réduction de
l’activité entraîne ensuite celle des recettes fiscales,
aggravant in fine le déficit. Les «marchés», qui
poussent à la réduction des dépenses, constatent le
creusement du déficit et exigent des taux d’intérêt de
plus en plus élevés pour prêter à l’Etat concerné,
alourdissant la charge de la dette. Ainsi, le 11 juillet
2011 les taux longs à dix ans espagnols et italiens ont
atteint des records historiques, entre 5,5% et 6%. Le 2 août
2011, nouveaux records pour ces mêmes taux, les rendements
des obligations espagnoles étant à 6,326% et ceux des
obligations italiennes à 6,165%. L’écart avec le taux
qui sert de référence, celui du Bund allemand (lequel était
à 2,426%) atteignait également un nouveau record. Une
situation clairement intenable dans le moyen ou long terme.
Au même moment, les taux à 10 ans du Portugal grimpaient
à 10,708% et ceux de la Grèce étaient stables, mais à
14,454% ! [6] Et les choses vont vite: le 27
juillet, l’émission par le trésor italien de 942
millions d’euros de titres à dix ans avait été placée
à un taux de 4,07%, alors que la dernière opération
similaire, datée du 27 mai, l’avait été à 2,51%! [7]
A ce rythme, le financement par l’Etat italien de son déficit
par appel aux marchés deviendra rapidement prohibitif.
Dans cette fuite en avant, un seuil a été franchi par le
sommet européen de Bruxelles du 21 juillet 2011. Un nouveau
plan d’aide à la Grèce de 109 milliards d’euros y a été
mis sur pied. La durée des nouveaux comme des anciens prêts
consentis à ce pays a été allongée pour être portée de
7,5 années à 15 ans. Le taux auquel ces prêts sont accordés
(très élevé, près de 6%) a été réduit, ramené entre
3,5% et 4%. L’Irlande et le Portugal, eux aussi «aidés»
par l’Europe, sont désormais logés à cette même
enseigne. Quant au Fonds européen de stabilité financière
(FESF), il s’est vu attribuer de nouvelles missions. Il
pourra prêter aux gouvernements pour les aider à
recapitaliser leurs banques, ou même prêter directement
aux banques en difficulté. Ainsi la même politique désastreuse
est poursuivie. L’aide à la finance est massive,
inconditionnelle, d’incroyables sommes continuent à y être
déversées sans qu’aucune contrepartie soit exigée,
aucune limitation, aucune réglementation. Par contre, des
sacrifices inouïs sont demandés aux peuples sur lesquels
s’abattent plans d’austérité, privatisations,
destruction du secteur public. Le tout sans que pour autant
il y ait sortie de crise: le Financial
Times estime
ainsi que l’ensemble des mesures du sommet ne parviendra
à diminuer l’endettement de la Grèce que de 7%. Pour
d’autres, il s’agit de 10% ou 20% [8], mais nous
sommes de toute façon loin du compte. En 2010, la Grèce a
enregistré un déficit public représentant 10,4% de son
PIB, au lieu des 9,6% initialement prévus [9]. Sa
dette publique doit dépasser les 150% du PIB en 2011 et
elle continuera d’étrangler un pays mis à genoux sur les
plans économique et social.
Le sommet du 21 juillet est donc dans la continuité
d’une orientation néfaste et s’il représente bien un
tournant, c’est sur un tout autre terrain: pour la première
fois une contribution a été exigée du secteur privé,
banques et autres organismes financiers. Il faut y voir le résultat
des pressions exercées par les contribuables excédés,
mais aussi la prise de conscience de la gravité du problème
et de l’impossibilité de continuer à y faire face avec
les vieux expédients. Il a été décidé que les dettes de
l’Etat grec ne seraient pas honorées selon les modalités
initialement prévues et les créanciers auront le choix
entre l’une des solutions suivantes : échanger leurs
titres contre des titres de maturité plus longue (30 ans),
reconduire à l’identique les titres arrivés à échéance,
ou vendre leurs titres sur un marché de l’occasion, avec
une décote.
Dans ce dernier cas de figure, le FESF serait amené, à
nouveau, à intervenir, en se portant acquéreur de ces créances
«d’occasion». Il est vrai qu’au cours de ce sommet il
a été prévu que tout rachat de ce type devrait être
autorisé par l’unanimité des pays de la zone euro. Il
n’en demeure pas moins que les banques pourraient ainsi se
débarrasser à bon compte d’une part de leurs actifs «toxiques»,
les frais étant à la charge du contribuable européen. On
pourrait même dire qu’elles seraient incitées à le
faire, prenant d’autant plus de risques dans leurs
placements qu’elles sont certaines de pouvoir se dégager
à bon compte. Malheureusement, une telle situation n’a
rien d’original. N’est-ce pas ce qui se passait déjà
avant ces nouvelles attributions du FESF? Les banques prêtaient
de l’argent à des pays de la zone euro sans trop se
soucier de leur surendettement, certaines qu’elles étaient
du secours qui viendrait de l’Europe monétaire en cas de
grave problème. Elles pouvaient ainsi, à la fois exiger
des taux d’intérêt particulièrement élevés, la
fameuse «prime de risque» (tout en se finançant à 1%
auprès de la BCE) et être assurées du remboursement de
leur principal à l’échéance. Le risque, normalement
assumé par le prêteur privé, était déjà de fait transféré
aux agents publics.
Le véritable tournant que représente le sommet européen
du 21 juillet est ailleurs: pour
la première fois, la porte du défaut souverain a été
ouverte. Les
estimations les plus diverses circulent à ce sujet. Le
nouveau plan d’aide à la Grèce s’élèverait à près
de 160 milliards d’euros, dont 109 milliards fournis par
l’Europe et le FMI, le reste provenant des créanciers
privés. De son côté, l’Institut de la finance
internationale indique que les banques créancières de la
Grèce apporteraient 135 milliards entre 2011 et 2020, et
sur ces 135 milliards, 54 d’ici à 2014. Les banques et
assureurs européens subiraient une décote de 21% sur la
dette grecque qu’ils détiennent [10]. Mais peu
importe pour l’instant les précisions chiffrées. Peu
importe aussi si le défaut est dit partiel ou sélectif.
L’important, c’est qu’il est avéré. Il est vrai que
le lobby financier a fait son œuvre et que le sacrifice
demandé aux banques prêteuses est de bien faible ampleur:
l’ensemble des provisions sur les titres grecs ne coûterait
qu’un milliard quatre cents millions d’euros aux banques
françaises et 843 millions aux banques allemandes [11].
Il n’en demeure pas moins qu’un créancier de l’Etat
grec n’est désormais plus certain d’être remboursé,
pour le montant prévu et à la date prévue. Déjà, dès
le 22 juillet, l’agence de notation Fitch a annoncé son
intention de placer la Grèce en défaut partiel. Le 25
juillet, c’est au tour de Moody’s d’annoncer que la Grèce
est à un cran du défaut de paiement et que cela sera le
cas une fois l’échange entre les anciens titres de la
dette grecque et les nouveaux effectué. Un tel défaut peut
avoir d’énormes conséquences. Il fragilise les
nombreuses banques qui, grisées par l’appât du gain, ont
engrangé de grandes quantités d’obligations publiques
grecques. Et ce d’autant plus que la BCE menace, s’il y
a défaut, de ne plus accepter (comme elle l’avait fait
jusqu’à présent) les titres grecs en contrepartie des
liquidités qu’elle accorde à des banques grecques qui ne
subsistent que sous perfusion. Il est vrai que l’Europe
monétaire a prévu de remplacer la BCE en apportant les
garanties nécessaires, mais l’engagement demeure flou et
il n’est pas sûr que cela soit suffisant. Surtout, ne
l’oublions pas, nombre d’organismes financiers détenteurs
de créances sur la Grèce se sont assurés contre le risque
de défaut par le biais des CDS, les credit
default swaps, des «produits dérivés» dont on ne
connaît pas le montant, et encore moins les détenteurs. Un
barrage risque ici de sauter, et un tsunami pourrait déferler.
Le danger est de taille, et pourtant la véritable menace
est ailleurs. Les participants au sommet européen ont peut-être
le sentiment d’avoir sauvé la Grèce, mais, dans la
mesure où il y a défaut, la méfiance des marchés pourra
se reporter immédiatement sur le pays suivant de la liste
(Irlande, Portugal…) et la chute des dominos reprendre son
cours. Admettre le défaut de la Grèce, c’est admettre
l’échec de toute la stratégie mise en œuvre jusqu’à
présent; c’est jeter le doute sur la capacité de cette
stratégie de s’attaquer aux problèmes des autres pays de
la zone euro. L’insistance du communiqué final du sommet
européen sur le cas unique que représenterait la Grèce
montre bien d’où vient le péril. Or, le soutien apporté
à la Grèce pourra beaucoup plus difficilement être apporté
aux autres pays européens menacés, compte tenu de leur
taille et de l’ampleur de leur endettement. Ce serait un véritable
mur de la dette qui s’abattrait, face auquel aucun FESF ne
résisterait, quelle que soit sa dotation (une dotation
aujourd’hui fixée à 750 milliards d’euros, mais une
garantie effective de prêts de 440 milliards d’euros). De
ce point de vue, un seuil a été franchi quand, en juillet
2011, la méfiance des investisseurs s’est tournée vers
l’Italie, car celle-ci pèse économiquement, à elle
seule, plus de deux fois plus que les trois pays réunis qui
ont été «aidés» à ce jour (Grèce, Irlande, Portugal).
Nous sommes donc face à un véritable tournant, en
quelque sorte une crise dans la crise. Parce que la Grèce
inaugure le défaut souverain et parce que l’inclusion de
l’Italie dans le cercle de la menace montre que, même en
réunissant ses forces, l’UE ne pourra pas sauver tout le
monde. José Manuel Barroso, président de la Commission
européenne, a fini par reconnaître que la crise de
l’endettement était celle de toute l’Europe et pas
seulement celle de sa périphérie. Il faut aller plus loin
et admettre le caractère universel de la crise du
surendettement public, qui n’est rien d’autre qu’une
manifestation du caractère universel de la crise de
2008-2009. Si Etats-Unis et Japon ont échappé pour
l’instant à la vindicte des marchés, c’est du fait
d’un effet de réputation: comment imaginer que deux des
principales puissances économiques mondiales pourraient
faire défaut? Ce à quoi il faut ajouter, s’agissant du
Japon, que sa dette publique est détenue, pour
l’essentiel, par des nationaux japonais, ce qui la rend
beaucoup plus stable et moins sujette aux mouvements spéculatifs.
En réalité Etats-Unis et Japon sont tout autant que
l’Europe concernés par le surendettement. La dette
publique du Japon bat tous les records, à 229% du PIB au début
2011 [12]. Quant au déficit de l’Etat fédéral américain
(net borrowing), il s’est élevé à 9,1% du PIB
au premier trimestre 2011. La dette publique américaine a
atteint à la mi-mai 2011 la limite légale (14 294
milliards de dollars) au-delà de laquelle l’Etat ne peut
plus augmenter son endettement. Ce plafond représente 96%
du PIB des Etats-Unis du premier trimestre 2011 (le PIB étant
évalué en termes annuels). Cette limitation levée,
l’endettement public américain a bondi à 14’580,7
milliards de dollars dès le 2 août, dépassant le montant
du PIB de 2010, atteignant 98% du PIB du premier trimestre
2011 [13]. On se rapproche des 100% et d’ailleurs le
pourcentage devrait être à 103% en 2012, selon le FMI [14].
Ce ratio était à 64,4% en 2007 [15] et, ici aussi,
c’est très clairement sous l’effet de la crise de
2008-2009 que l’emballement a eu lieu.
Bien qu’étant une conséquence logique de cette
situation, la décision de l’Agence de notation Standard
and Poor’s de dégrader la note de la dette publique américaine
a fait l’effet d’une bombe. Le 5 août 2011 l’Agence a
fait passer la note de cette dette de AAA (sommet indépassable)
à AA+, le tout sous perspective négative. Une décision
qui va augmenter le coût des emprunts américains (et
aggraver ainsi le surendettement), pousser à la hausse les
taux d’intérêt à moyen et long terme, menacer l’édifice
financier mondial (qui repose pour une part sur le classique
bon du trésor américain), dévaloriser le patrimoine de
ceux qui détiennent des titres de la dette publique des
Etats-Unis (à commencer par la Chine), rendre ainsi plus
difficile le financement du déficit extérieur américain
et surtout accroître dans d’énormes proportions le
sentiment de défiance à l’égard des titres publics
quels qu’ils soient: si l’on ne peut plus avoir une
confiance absolue dans les Etats-Unis, alors quelle
confiance accorder aux autres Etats? Ce qui renchérira, par
ricochet, le financement de tous les déficits publics et
poussera, de ce fait, encore plus de pays vers le défaut de
paiement. Ceci sans compter le coup porté à la confiance
des agents économiques, qui hésiteront encore plus que par
le passé à investir ou consommer.
Suivant en cela une orientation keynésienne, certains
pensaient que la politique budgétaire, celle des plans de
relance et des déficits publics, avait été la solution
miracle à la crise, un remède que l’orthodoxie avait empêché
d’appliquer en 1929 et qu’on avait eu le courage de
mettre en œuvre aujourd’hui. Il apparaît maintenant que
l’endettement public ainsi généré n’est rien
d’autre qu’une forme particulière prise par une crise
qui poursuit sur sa lancée, revêtant un déguisement après
l’autre. De fuite en avant en fuite en avant, du temps a
été gagné, les échéances repoussées, en passant de la
crise de la nouvelle économie à celle de l’immobilier,
du surendettement des ménages à celui des banques, enfin
du surendettement de ces dernières à celui des Etats. Mais
l’onde du déséquilibre échappe désormais au contrôle,
les Etats sont la dernière digue, et celle-ci est en train
de céder. Voici venue l’heure de solder les comptes.
Ainsi que je le disais dans mon ouvrage La
grande crise du XXIe siècle,
paru en mars 2009: «On
peut (…) se demander si la prochaine forme que prendra la
crise ne sera pas celle, catastrophique, de la méfiance à
l’égard des placements en bons d’Etat, habituellement
considérés comme parfaitement sûrs. Jusqu’ici, il est
vrai, le flot de capitaux quittant la Bourse ou refusant
d’acheter des obligations d’entreprise s’est
massivement reporté sur les emprunts d’Etats, qui ont pu
se financer à bon compte. Mais le risque augmente aussi de
ce côté-là et son appréciation devient plus claire
(…). Plus augmente la masse de l’endettement public, et
plus il faudra payer cher pour continuer à s’endetter.
Les Etats peuvent intervenir pour sauver le système
capitaliste, ce qu’ils ont fait jusqu’ici, sans se gêner.
Mais qui sauvera les Etats eux-mêmes, si leur crédibilité
économique est menacée ? Ils sont le dernier rempart ;
derrière, il n’y a plus rien.» [16]
Les Etats-Unis
Alors que débute l’été 2011, l’Europe, nous venons
de le voir, est le grand sujet d’inquiétude, mais il était
alors admis qu’à cette exception près, le monde était
sorti de la crise. Or, traiter de la conjoncture mondiale,
c’est d’abord traiter de la conjoncture américaine et
on ne peut certainement pas dire que les Etats-Unis aient
surmonté la plus grave crise qu’ils aient connue depuis
celle de 1929, bien au contraire.
Voyons cela de plus près. Le PIB américain, stagnant en
2008 (-0,3%), baisse fortement en 2009 (-3,5%). Un
effondrement désastreux, mais qui aurait pu être abyssal
sans une intervention publique à grande échelle. Le revenu
des ménages de 2009 décroît par rapport à 2008, de façon
très importante (-530 milliards de dollars). Mais la dégringolade
aurait dû être bien plus grave sans une violente
augmentation des transferts publics en leur direction (+259
milliards), augmentation qui a contrebalancé presque entièrement
l’affaissement du total des salaires (-272 milliards). Le
revenu disponible des ménages chute aussi (-235,7
milliards), mais beaucoup moins que leur revenu. Ce qui
s’explique par une diminution dramatique des impôts sur
le revenu des personnes physiques (-294,3 milliards), liée
en partie à la chute des revenus mais aussi à une
politique d’allégement fiscal de grande ampleur. La somme
(salaires publics + transferts publics aux ménages – impôts
sur le revenu des personnes physiques) résume le soutien
public apporté aux ménages : elle est de 15’87,6
milliards de dollars en 2008 et de 2172 en 2009, soit un
accroissement de 584,4 milliards. Un soutien d’une
exceptionnelle ampleur. C’est lui qui a fait qu’en
passant du revenu des ménages à leur revenu disponible, la
chute a été réduite de moitié. C’est lui qui a évité
la transformation d’une récession en profonde dépression. La
véritable question est alors de savoir quel sera le
comportement de cette économie une fois retiré
l’extraordinaire échafaudage public édifié autour
d’elle.
Pour cela, tournons-nous vers les données trimestrielles
sur la somme (salaires publics + transferts publics – impôts
sur le revenu des personnes physiques). Elles montrent que
le soutien public, massif, s’est fortement accru au cours
de l’année 2008 et du premier semestre 2009. Ce soutien
se maintient à un haut niveau au cours de l’année 2010,
qui voit alterner montées et reculs de l’apport public.
Le véritable tournant se situe au cours du premier
trimestre 2011: la somme que nous venons d’évoquer
(salaires publics + transferts publics – impôts sur le
revenu des personnes physiques) chute fortement (-133
milliards de dollars), alors que les dépenses publiques
enregistrent un net recul (-5,9%, prolongé par un -1,1% au
cours du deuxième trimestre 2011). Le soutien public
commence donc son mouvement de retrait. Mais, élément
essentiel, le
privé ne prend pas le relais. L’immobilier est
toujours dévasté: – 27,7% en 2010 (III), puis la
stagnation: +2,5% en 2010 (IV), -2,4% en 2011 (I) et +3,8%
en 2011 (II). L’investissement des entreprises n’a aucun
dynamisme et, s’il continue à augmenter, le rythme de
cette croissance va diminuant: 18,6% en 2010 (II), 11,3% en
2010 (III), 8,7% en 2010 (IV) et enfin 2,1% en 2011 (I),
suivi par un léger rebond (+6,3%) en 2011 (II). Quant à la
contribution du commerce extérieur, elle est quelquefois
positive, mais souvent négative. Le résultat d’ensemble
(dont on devine la fragilité) est particulièrement terne
pour le deuxième trimestre 2011 (+1,3% pour le PIB) et
proche de la stagnation pour le premier trimestre de cette
année (+0,4%).
Reste l’essentiel: la consommation des ménages, qui pèse
particulièrement lourd aux Etats-Unis (elle fait dans ce
pays 70,5% du PIB, et seulement 56%, par exemple, en
France). Mais, étranglée par des salaires comprimés,
menacée par le chômage, négativement influencée par la
chute de valeur du patrimoine immobilier, cette consommation
s’essouffle et peine de plus en plus à tirer
l’attelage. En rythmes annuels, elle s’était accrue de
3,6% au cours du quatrième trimestre 2010, mais seulement
de 2,1% au cours du premier trimestre 2011 et enfin d’un
insignifiant 0,1% au cours du deuxième trimestre de cette
année. Mais, dira-t-on, les contraintes qui pèsent sur la
consommation américaine ne datent pas d’aujourd’hui et
elles ont toujours été surmontées. C’est exact, mais
cela a été le cas grâce au modèle «de moins en moins
d’épargne, de plus en plus de dettes». Un modèle qui a
permis de soutenir la demande globale lorsqu’elle venait
à défaillir et ce, sans avoir à augmenter les salaires,
la chute du taux d’épargne augmentant la consommation
sans que bouge le revenu, la hausse du taux d’endettement
soutenant la dépense de consommation ou d’investissement
(dans l’immobilier) bien que plafonnent les rémunérations.
Un modèle qui tient de la solution-miracle, mais explosif,
comme on le voit aisément, chute du taux d’épargne et
montée du taux d’endettement ayant nécessairement une
fin. La crise de 2008-2009 est la crise de ce modèle, et on
ne voit pas comment obtenir les mêmes résultats alors
qu’il est hors service.
Désormais, en effet, le taux d’épargne des ménages se
redresse, et il est frappant de constater que les deux années
de récession (2008 et 2009) ont été précédées par un
bond de ce taux qui lui a fait gagner 3 points d’un seul
coup, passant de 2,4% en 2007 à 5,4% en 2008. C’est dire
toute l’importance de ces ajustements, l’importance de
la chute de ce taux sur de nombreuses années (il était à
1,5% en 2005), alimentant à bon compte la consommation,
donc aussi la croissance; mais également, ensuite,
l’importance de sa remontée. Une telle remontée, inévitable
en période de crise, s’explique par la reconstitution
d’une épargne de précaution, mais aussi par l’éclatement
de la bulle immobilière et par l’effondrement des prix de
l’immobilier qui l’accompagne: ce dégonflement de la
valeur du patrimoine entraîne («effet richesse») une
chute de la propension à consommer et une remontée corrélative
du taux d’épargne.
Le vide s’ouvre sous les pas de l’économie américaine,
parce que le soutien public a commencé à se retirer sans
que le privé prenne la relève, et il en est ainsi parce
que l’ancien modèle («de moins en moins d’épargne, de
plus en plus de dettes») ne fonctionne plus, alors qu’il
n’a été remplacé par aucun autre. Il n’est plus
possible, comme cela a été le cas pendant de nombreuses
années, d’alimenter la consommation par une baisse du
taux d’épargne plutôt que par une augmentation du
revenu. Il n’est plus possible, comme cela a été également
le cas pendant de nombreuses années, d’alimenter
l’immobilier par un endettement inconsidéré. La crise
est passée par là, et elle joue son rôle de rétablissement
des équilibres, redressant un taux d’épargne des ménages
qui était proche de zéro, réduisant au contraire un taux
d’endettement devenu insoutenable. Ainsi, la dette totale
des ménages américains culmine à 13’844 milliards de
dollars en 2008 ; elle chute ensuite à 13’611
milliards en 2009, puis à 13’386 en 2010; au premier
trimestre 2011, on chute encore à 13’318 milliards.
L’impasse est telle que l’on peut se demander si l’économie
américaine peut connaître une croissance en l’absence de
bulle spéculative, sans la bulle (boursière) de la
nouvelle économie, ou sans celle de l’immobilier, qui
l’a suivie.
L’heure de vérité a sonné de part et d’autre de
l’Atlantique, parce que la crise continue, en prenant
d’autres déguisements et que les expédients utilisés
pour reporter les échéances sont en voie d’épuisement.
En Europe cette crise prend surtout la forme du
surendettement public, aux Etats-Unis surtout celle d’un
étouffement de la croissance. Mais la décision de Standard
and Poor’s de dégrader la note américaine en dit long
sur le caractère universel d’une crise mondialisée. Le
dernier rempart, celui des Etats, est en train de céder.
Mordant la main qui les a nourris, les «marchés» exigent
d’être sauvés sur fonds publics, puis n’hésitent pas
à se ruer sur ces mêmes Etats qui les ont secourus. Sous
leur pression, les politiques d’austérité mises en place
approfondissent la crise et ce, d’autant plus violemment
qu’elles sont maintenant généralisées. Ce faisant,
supposées réduire l’endettement, ces politiques
l’aggravent au contraire, par réduction des recettes
fiscales. Pris dans ce cercle vicieux, le monde capitaliste
a d’autant plus de mal à trouver la voie de la sortie que
les munitions publiques ont été tirées et sont désormais
épuisées, qu’il s’agisse de l’instrument budgétaire
ou du monétaire, les taux des banques centrales étant
toujours maintenus au plancher, sans grands résultats.
Derrière des Etats désarmés, on voit maintenant apparaître
clairement les lois implacables du système capitaliste,
celles dictées par la soif inextinguible de profit, un système
menacé d’effondrement et qui risque d’entraîner
l’humanité tout entière dans sa chute.
Que faire?
Ce n’est pas ici le lieu d’énoncer l’intégralité
d’un programme qui passerait en revue toutes les mesures nécessaires,
certaines qui découlent directement de la situation
actuelle, d’autres qui en sont la conséquence logique,
d’autres encore qui s’attaquent au système capitaliste
dans ce qu’il a de plus fondamental. Cela serait utile,
mais le feu est à la maison et il faut mettre en œuvre
l’indispensable quitte à ce que, à partir de là,
d’autres voies soient ouvertes sur un autre horizon. Il
faut – priorité des priorités – éteindre l’incendie
de la dette. Il faut – geste de survie – maîtriser la
finance, l’empêcher de nuire, une bonne fois pour toutes.
Il faut – préparation de l’avenir – jeter les bases
d’un redémarrage, de façon à assurer l’emploi.
L’urgence absolue est de faire face au problème de la
dette publique. Trois points sont essentiels:
1) quel que soit le pays, il faut décréter un moratoire
sur la dette existante et la soumettre à un audit, pour
porter un jugement circonstancié et déterminer quelles
dettes seront remboursées et quelles ne le seront pas. Une
partie substantielle de la dette, cela est clair, devra être
répudiée. Le reste sera soumis à restructuration : rééchelonnement,
réduction, plafonnement, etc. 2) réformer dans les plus
brefs délais les statuts de la BCE, pour permettre le
financement monétaire du déficit public (achat par la BCE
des titres de la dette publique lors de leur émission). La
BCE procède déjà à des achats de tels titres, mais il
s’agit surtout du «marché de l’occasion», où les
titres achetés par les banques sont revendus. Ce qui permet
aux banques, tout à la fois, d’exiger une prime de risque
lors de l’achat du titre et d’être assurées ensuite de
pouvoir le revendre. Le financement monétaire du déficit
enlèverait son pouvoir de chantage à la finance. 3) En
matière de déficit public, il faut redresser la situation,
surtout s’il faut renoncer aux fonds fournis par les marchés.
Une réforme fiscale d’ampleur s’impose, pour revenir
sur les avantages consentis aux patrons et taxer fortement
les hauts revenus, les profits des sociétés et les
patrimoines des riches.
La crise l’a montré de façon éclatante… et désastreuse:
il faut ligoter la finance . Ce qui, outre l’interdiction
de la titrisation des créances et des fonds spéculatifs,
implique la levée du secret bancaire, la chasse aux paradis
fiscaux et la constitution d’un grand pôle bancaire
public, par nationalisation d’un nombre significatif de
banques en position dominante. L’appareil bancaire doit être
soumis à un contrôle sévère, la séparation entre banque
de dépôts et banques d’affaires restaurée. Il faut
taxer les transactions financières, instaurer le contrôle
du mouvement des capitaux. Il faut interdire les ventes à découvert,
qui permettent la spéculation sur titres. Il faut aussi
placer les Bourses en position subordonnée, ce que nous
pouvons obtenir par une taxation renforcée des plus-values,
l’introduction d’un délai entre l’achat et la revente
des actions ou carrément la non-cessibilité des titres émis.
Il faut enfin mettre les banques centrales et toutes les
institutions financières sous le strict contrôle des
pouvoirs publics.
Si l’on ne veut pas que les mêmes causes produisent les
mêmes effets, il faut rompre avec le modèle de la
mondialisation libérale. Ce qui suppose bien des choses
qu’on ne peut développer ici, qu’il s’agisse du droit
de propriété de l’entreprise, d’une autre
mondialisation (et d’une autre Europe), du périmètre des
biens communs ou encore de la crise écologique. Mais
l’indispensable, le socle à partir duquel bâtir, c’est
un nouveau rapport salarial. En effet, il faut un nouveau
partage de la valeur ajoutée, radicalement différent de
l’actuel, pour assurer les bases d’un autre développement.
Il faut aussi stabiliser le marché du travail, en rétablissant
la prépondérance des CDI, en confinant les diverses formes
du travail précaire, en encadrant strictement les
licenciements. Il faut garantir les acquis sociaux, en finir
avec les politiques d’austérité, reconstituer des
services publics dignes de ce nom.
Voilà le plus urgent. L’accomplir serait déjà énorme,
mais s’en tenir là serait illogique. Ne voit-on pas que
derrière tel ou tel «excès» de la finance, il y a
l’esprit d’un système, le capitalisme? Ne voit-on pas
que, derrière la mondialisation libérale, il y a encore et
à nouveau les exigences d’un système, le capitalisme? La
crise actuelle a déjà suscité d’immenses souffrances
dans le monde. Ses nouveaux développements sont, de ce
point de vue, terriblement menaçants. Il est temps de tirer
un trait, il est temps de changer d’horizon.
Achevé de rédiger le 7/08/2011.
Notes :
[1] Le
piège de la dette publique. Comment s’en sortir, Jacques
Cossart, Evelyne Dourille-Feer (coord.), Attac, Ed. Les
liens qui libèrent, mai 2011, page 70.
[2]
Ibid, page 69.
[3] La
dette ou la vie, Damien
Millet et Eric Toussaint, coord., edit. Aden, mai 2011,
pages 213, 214.
[4] Intervention de Jean-Claude Trichet, Président de la
BCE, aux Rencontres économiques d’Aix, rapportée par
Olivier Lecomte, La
Tribune, 11/07/2011.
[5] AFP, 5/05/2011.
[6] AFP, 2/08/2011.
[7] AFP, 27/07/2011.
[8] Martine Orange, Mediapart, 26/07/2011.
[9] AFP, 9/05/2011.
[10] Reuters, 28/07/2011.
[11] Martine Orange, Mediapart, 26/07/2011.
[12] AFP, 4/08/2011.
[13] AFP, 4/08/2011. La dette prise ici en compte cumule
celle de l’Etat fédéral américain et celle des Etats
qui constituent l’Union, ainsi que celle des
administrations locales, contrairement au tableau 2, qui
s’en tient à celle des seules administrations centrales.
[14] AFP, 25/07/2011.
[15] AFP, 4/08/2011.
[16] La
grande crise du XXIe siècle. Une analyse marxiste, La
Découverte, pages 118, 119.
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